La Vipère d’Orsini (Vipera Ursinii)
Article mis en ligne le 17 février 2015

par Philippe Pellicier

La Vipère d’Orsini (Vipera ursinii) dont la taille n’excède pas 50 cm de longueur est la plus petite vipère d’Europe. On la rencontre dans des milieux très différents selon les sous-espèces. Son aire de répartition qui s’étend de l’Europe occidentale à la Chine, est très morcelée. En France où elle est très rare, elle fréquente une dizaine de stations de pelouses calcaires de zone montagneuses du sud du pays, couvertes de genévriers nains ou d’autres arbustes. L’éloignement des différentes stations ne permet pas de communication entre elles, ce qui ne favorise pas la dynamique des populations, mettant en sérieux danger leur pérennité, et ce qui souligne l’importance de les préserver. Il y a actuellement un programme européen de protection de la Vipère d’Orsini et à la restauration ou l’agrandissement des milieux où elle est présente (programme Life Vipère d’Orsini).
La Vipère d’Orsini est grise avec un motif en zigzag sur le dos et ses écailles sont carénées. Les femelles sont un peu plus grosses que les mâles. Elle se nourrit essentiellement d’orthoptères (criquets et sauterelles) et son venin adapté aux insectes est quatre fois moins toxiques pour l’homme que celui de la Vipère aspic. Aucune morsure répertoriée n’a nécessité d’hospitalisation. Son régime alimentaire l’oblige à s’alimenter régulièrement contrairement aux autres serpents qui peuvent jeûner longtemps. La Vipère d’Orsini est ovovivipare. Les petits naissent en septembre au nombre de quatre ou cinq et ne commenceront à s’alimenter qu’à partir du printemps suivant. Dès la fin de l’automne l’animal entre en hibernation dans les anfractuosités de rochers ou entre les racines de genévriers et se réveille au cours du printemps.

Vipère d’Orsini
La vipère d’Orsini que nous avons eu la chance d’observer pendant plusieurs minutes. Elle prenait le soleil à proximité d’un bosquet de genevriers. Nous ne l’avons pas dérangée, seulement photographiée à distance...
Photo D. Sanboeuf

Ses prédateurs sont le grand corbeau, le Circaëte Jean-le-Blanc (rapace spécialisé dans les serpents), le sanglier, le blaireau, la coronelle lisse et du fait du réchauffement climatique la couleuvre verte et jaune, qui arrive à monter plus haut en altitude. Mais la plus grosse menace qui pèse sur cette espèce rarissime en France est l’homme, en particulier les photographes qui cherchent à les capturer pour les photographier.
La vipère d’Orsini a été décrite pour la première fois en 1835 par Carlo Luciano BONAPARTE, neveu de Napoléon BONAPARTE. Sa description se base sur un spécimen collecté dans les Abruzzes par un pharmacien et homme politique italien du nom de Antonio Orsini. Et c’est pour rendre hommage à cet homme que Bonaparte baptise cet animal : Vipère d’Orsini.
Lors de notre séjour printanier dans les Baronnies en 2014, nous avons rencontré par hasard sur le terrain, sur une zone à Vipère d’Orsini sans le savoir, M. Jean-Pierre Baron, naturaliste spécialisé dans l’étude de ce reptile. Après que nous ayons entamé la conversation et fait les présentations, il nous a parlé avec passion de son travail de recherche commencé il y a plus de trente-cinq ans. Il visite chaque année les stations concernées en France et marque chaque individu de façon unique de façon à les reconnaître et à suivre l’évolution des populations. Il note aussi de façon minutieuse le poids, la longueur, la couleur, il prélève de la salive pour l’ADN à l’aide d’un instrument stérile. Ces manipulations sont réduites au strict nécessaire et les animaux sont relâchés au même endroit le jour même.
Bien que les abords de la station de Mont-Serein soient aménagés pour protéger la nature et les vipères en particulier, la pression humaine est très forte : promeneurs, pique-niqueurs, vététistes, motards, 4X4, et aussi des photographes naturalistes qui agissent parfois sans discernement de l’impact des captures. La zone est protégée et la capture des animaux est strictement interdite.
Pour notre part, alors que M. Baron n’avait pas encore observé de vipère depuis deux jours qu’il était sur les lieux, nous avons eu la chance, en groupe d’en observer une qui restait immobile au soleil ! Quelle chance pour nous, de s’être arrêté au hasard sur cette station, d’avoir rencontré un grand spécialiste qui nous a fait découvrir une espèce mythique dont nous connaissions à peine le nom, et d’avoir observé l’animal in situ !
Ce n’est pas de la publicité pour les séjours nature de l’association « Nature en Tarentaise », c’est bien ce que nous avons vécu ce printemps 2014 !
Merci Dominique pour la photo !

Pour en savoir plus : http://www.vipere-orsini.com/fr/

Un très beau site qui consacre un article sur la Vipère d’Orsini

Des documents de Jean-Pierre Baron sur