13 juillet 2014 : la Combe de Cléry
Article mis en ligne le 19 août 2014

par Philippe Pellicier

Séjour botanique au Mont-Cenis du 12 au 14 juillet 2014 : deuxième jour.

Au lever du jour le vent semble avoir chassé la pluie mais de nombreux nuages barrent le ciel et couvrent les sommets ne laissant voir que quelques zones de ciel bleu. Les prévisions n’annoncent plus de pluie. Sur l’Italie le ciel est presque sans nuage. Nous décidons de maintenir notre destination, la combe de Cléry. Nous allons en voiture jusqu’au col et redescendons jusqu’à la Ramasse où nous Garons les voitures. De là nous partons à pied pour rejoindre la comme de Cléry.
Nous commençons par herboriser dans une zone humide où nous notons entre autres :

  • le Saule bleu (Salix caesia), petit saule aux feuilles ovales et glauques, connu en HauteTarentaise et Haute Maurienne où il n’est pas fréquent ;
  • la Swertie vivace (Swertia perennis), gentianacée aux fleurs violet foncé ouvertes en étoiles, se rencontre rarement dans les marais neutrophiles.

Dans la prairie très hygrophile aux alentours on note quelques plantes intéressantes :
 la Crépide de Boccone (Crepis pontana), plante robuste aux gros capitules portés sur une tige renflée, aux grandes feuilles ovales lancéolées ;
 la Pédiculaire chevelue (Pedicularis comosa), aux fleurs jaunâtres dont le bec est munie de deux dents au sommet ;
 la Pédiculaire feuillée (Pedicularis foliosa), ressemble à précédente mais plus haute et avec de grandes bractées dans l’inflorescence ;
 la Berce de montagne (Heracleum sphondyllium subsp. elegans) qui présente des feuilles glabres à la surface supérieure.

La piste traverse ensuite un mélèzin dans lequel nous nous attardons malgré la marche qui nous attend. Nous observons un papillon blanc du groupe des piérides, qui montre des zones marbrées de vert à la face inférieure des ailes postérieures, il s’agit de la piéride de l’arabette (Pieris bryoniae), il s’agit d’une espèce montagnarde assez facile à reconnaître. Claudie nous fait aussi observer un gros papillon de nuit, le Hibou (Noctua pronuba) aux teintes grise et brune qui la rendent invisible sur les cailloux et les morceaux de bois du bord du chemin.
Dans ce bois de mélèzes (Larix decidua) mêlés d’arolles (Pinus cembra) caractérisé par ses aiguilles réunies par cinq, nous établissons notre liste de plantes parmi lesquelles on peut citer :
 la Fétuque jaunâtre (Festuca flavescens), typique de ce milieu en Haute-Maurienne et Haute-Tarentaise.
Le long du chemin dans le sous-bois il y a une partie en mégaphorbiaie avec des Aulnes verts, de l’Adénostyle à feuilles d’alliaire, du Vélar à feuille de tanaisie, les Saules à feuilles hastées et noircissant avec :

  • le Saule glauque (Salix glaucosericea) entièrement gris blanchâtre à cause du tomentum couvrant entièrement la plante ; il est prtoégé en Rhône-Alpes ;
  • l’Achillée à grandes feuilles (Achillea macrophylla), caractéristique de ce type de milieu ;
  • la Pyrole intermédiaire (Pyrola media) au style droit et longs et aux sépales lancéolés non appliqués ; la plante connue de quelques endroits dans le département bénéficie d’une protection régionale.

Près du pont Lapouge, nous sortons de la forêt et explorons les berges du torrent dans une zone humide de pente. Nous y trouvons un cortège de plantes arctico-alpines caractéristiques des zones alluvionnaires de la zone alpine sur terrains calcaires :
 la Laîche bicolore (Carex bicolor) aux épis bigarrés bruns et glauques très reconnaissables, la plante est protégée en France ;
 la Laîche à petite arête (Carex microglochin) aux épis terminaux et aux utricules prolongées en arête, plante protégée en France ;
 la Laîche à feuilles capillaires (Carex capillaris), très grêle, aux feuilles fines et aux pédicelles fins comme des cheveux, très discrète, pousse sur des petites buttes plus sèches ;
 la Tofieldie naine (Tofieldia pusilla), toute petite liliacée formant une inflorescence capitée blanchâtre, c’est une plante protégée au niveau nationale ;
 le jonc à trois glumes (Juncus triglumis) petit jonc portant également une inflorescence capitée, ce jonc est en Savoie un peu plus fréquent que les plantes précédentes.

Un peu plus loin sur le chemin dans le même type de milieu mais un peu plus moussu nous avons observé :

La Laîche maritime
Photo Ph. Pellicier

- la Laîche maritime (Carex maritima), laîche à épi jaunâtre unique et à tige cylindrique, protégée au niveau régional ;
 la Racine de corail (Corallorhiza trifida), un seul pied rachitique de cette orchidée que l’on trouve habituellement dans la pessière.

Dans la montée le long de la piste qui rejoint le pont Bonneval, nous avons pu observer la Croisette de printemps (Cruciata glabra), elle ressemble à la Croisette commune, mais plus grêle avec des fleurs jaunâtres et pas de bractée dans l’inflorescence. Cette plante, non citée dans le catalogue de Perrier de la Bathie, connue depuis 2002 de quelques rares communes de Savoie dont la Haute Maurienne, semble inconnue à cet endroit.
Aux alentours du pont Bonneval nous notons parmi la pelouse et les rocailles quelques plantes qui méritent d’être citées :

  • la Saussurée des Alpes (Saussurea alpina subsp. alpina), asteracée aux fleurs bleu violacé et aux capitules en corymbe serré, se rencontre seulement dans les Alpes et une partie des Pyrénées, où elle n’est jamais fréquente ;
  • la Pédiculaire rose (Pedicularis allionii subsp. rosea) aux feuilles très fines et luisante évoquant une peu des feuilles de fougère ;
  • la Raiponce du Piémont (Phyteuma globulariifolia subsp. pedemontana), voisine de la très commune Raiponce hémisphérique (P. hemisphaericum) également présente, montre des feuilles spatulées et des bractées ovales sous le capitule ;
  • l’Oxytropis helvétique (Oxytropis helvtica), plante subacaule en rosette appliquées au sol, aux fleurs lilas pâle, aux pétioles lavés de rouge, fréquent seulement au Mont Cenis, en Haute-Maurienne et Haute-Tarentaise ;
  • l’Oxytropis de Laponie (Oxytropis lapponica), plante à tige un peu plus développé que le précédent, à port plus dressé, montre des fleurs bleu violacé, une bractée florale dépassant la demi longueur du tube calicinal et des stipules soudés entre eux ;
  • le Pétrocalle des Pyrénées (Petrocallis pyrenaica), brassicacée en coussinet aux fleurs roses.
  • la Sabline à deux feuilles (Arenaria bifolia) aux tiges rampantes sur le sol et aux feuilles en cuillère et la Sabline ciliée (Arenaria ciliata) formant des touffes et aux feuilles pointues ; Un champignon parasite du groupe des « charbons » (Ustilaginales) est trouvé dans les étamines de la Sabline ciliée, il s’agit de Microbotryum stellariae (Sow. ex Liro) Deml & Oberwinkler. Ses spores prennent la place du pollen dans les étamines, ce qui donne une aspect de « fleurs sales », et le champignon profitera de la visite des insectes pour sa dissémination, tout comme le pollen.
La Laîche des glaciers
Plante nouvelle pour les Alpes dans toute l’Europe, découverte par Claude Pépin en 2004.
Photo Ph. Pellicier

Après le pique-nique pris près du pont, nous nous mettons en recherche de la Laîche des Glaciers (Carex glacialis). Il s’agit d’une espèce connue dans la région polaire tout récemment découverte dans les Alpes. Elle a été rapidement intégrée à la liste des espèces protégées au niveau National. Après une recherche assidue nous avons pu trouver la plante qui croît dans des pelouses très rocailleuses.
Dans le même milieu nous notons aussi :

  • la Gentiane de Schleicher (Gentiana schleicheri), gentiane assez rare caractérisé par les extrémités des feuilles relevées en spatule de ski ;
  • l’Androsace de Briançon (Androsace adfinis subsp. brigantiaca), aux fleurs blanches rosées et aux feuilles dentées presque glabres.
    Après avoir bien herborisé dans ce secteur, nous prenons le chemin du retour en deux groupes : soit directement sur le col du Mont Cenis dans un sentier un peu raide, soit en rebroussant chemin.

Au passage du petit col nous observons :

  • le génépi des glaciers (Artemisia glacialis) à l’inflorescence en ombelle capitée
  • l’Astragale australe (Astragalus australis) aux pétales blancs et carène bleu violacé et aux ailes échancrées.

Sur la descente nous photographions deux champignons intéressants dans les saules nains :

  • un agrocybe anelé à pied bulbeux Agrocybe sphaleromorpha
  • un cortinaire du groupe des Myxacium totalement gluants le Cortinaire de Favre (Cortinairus favrei). Merci à J.L. Cheype pour les détrerminations.

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